WONDERBRAZ

Wonderbraz au pays des merveilles

 

Sous le pseudonyme de Dj Wonderbraz, Yuna Le Braz, mixe, avec maestria, depuis 20 ans, des musiques du monde que l’on n’a pas souvent l’occasion d’écouter. Des musiques à la fois populaires, traditionnelles, anciennes ou actuelles, qu’elle a ramenées de ses voyages ou que des amis d’autres contrées lui ont confiées.

Des trésors, des collectors. Des morceaux électro-exotiques, des mélodies hip hop dépaysantes, des bombes métissées, à effet garanti sur le dancefloor. Guidée par son pur instinct, associé à sa connaissance de la planète musiques, Wonderbraz balance, avec naturel, des sons du monde.

Car cette chercheuse de sons non formatés, très concernée par la libre circulation des artistes et des musiques, est bien plus qu’une simple passeuse : Wonderbraz est une activiste culturelle. Une vocation déjà affirmée, pendant une décennie plutôt intense, à Douarnenez, avec ses « Arts dînent à l’huile », festival audacieux et original. Brésil, Sénégal, Portugal, Maroc, Marseille, chaque année, un port sardinier invité, des propositions artistiques indisciplinées, ses coups de cœur et ses coups de foudre partagés…

Aujourd’hui, on peut la rencontrer aux Ateliers du Vent, à Rennes, ou elle collabore a un intéressant mélange de théâtre, musiques, et arts plastiques. Mais c’est surtout avec son nouveau projet, Turbo sans visa, que Wonderbraz va encore plus loin. Elle croise désormais ses platines avec les vidéos de Thierry Salvert, alias BadGreen, qui partage avec elle ce même goût d’ailleurs. Et elle invite en live le chanteur breton Erik Marchand, lui aussi passionné d’esthétiques hybrides.

À bord de ce Turbo sans visa, on voyage vers d’étranges territoires d’où s’élèvent des sons balkaniques, berbères, béninois ou bretons. Un concentré, puissant et parfumé, de Wonderbraz au pays des merveilles…

Frédérique Guiziou / Ouest France

 

YUNA LE BRAZ alias WONDERBRAZ : artiviste indisciplinée

Texte de Gérard Alle (revu par Éric Premel)

 

À Paris, c’est elle, Yuna, qui envoie les scuds que personne n’a jamais vus passer. On lui demande : C’est quoi ce truc ?... Ha ! Ha ! Si j’te disais, tu m’croirais pas !

Yuna mixe. Elle est dans la musique. Comme d’autres la font. En y étant, elle la fait !

 

Yuna programme. Yuna manage, aussi. Des centaines de dates avec No One is Innocent, Les Ténors de Brest, Gnawa Diffusion, des festoù-noz endiablés à l’Élysée Montmartre…

 

Yuna a 19 ans, quand elle aligne neuf heures de mix non stop dans un bar du port, A l’Abri du Vent, en Bretagne, à Douarnenez.

La tempête souffle dans les têtes. C’est le genre de fête qui ne veut pas s’arrêter, qui se poursuit et te poursuit longtemps, longtemps après. Pendant cette nuit de carnaval, Yuna devient Wonderbraz, une DJ qui a de la conversation...

 

Yuna voyage toujours, comme elle a toujours voyagé. Et elle ramène des musiques, des copains et des ananas. Au retour, elle fait écouter, elle fait goûter. On lui demande : C’est quoi, ce truc ?... Ha ! Ha ! Devine...

Trois ans après la première nuit de tempête Wonderbraz, avec sa bande, Yuna fait tomber une pluie de Zardines sur le port sardinier breton. Les Arts dînent à l’huile, un festival pour transmettre, faire découvrir, expérimenter, décloisonner. Un port invité, à chaque fois, avec ses sardines en tenue d’été. Brésil, Sénégal, Portugal, Maroc, Marseille... Yuna aime les rencontres. Elle aime aussi croiser les disciplines...

 

Un jour, Yuna regarde un grand bâtiment abandonné, celui des Affaires maritimes, petit port à l’extrême Ouest de l’Europe. Comme un symbole de la pêche en chute libre et de la pêche qu’il va falloir retrouver. Le pouvoir cloisonne, récupère, subventionne. L’artiste fait péter les murs. Alors, Yuna investit la Friche avec ses copains plasticiens. Occupation. Négociations. Installations.

Entre les Zardines, la Friche et les soirées DJ, Yuna vit dix années intenses, de rencontres et d’expérimentations.

Quand la Friche et les Zardines scissionnent, elle ramasse les pots cassés pour les transformer en Miettes de Baleine, ce sera le nom d’un nouveau lieu, une galerie associative à Douarnenez, avec Roberto Cedròn l’Argentin, et Serge, le peintre expert en vaches neurasthéniques

A un moment, on la voit à Cotonou, à monter un festival de musiques urbaines africaines.
A un autre, on la croise à Marseille.

A un autre on ne sait plus où elle est. Elle revient. Elle revient toujours et chaque fois différemment.

Elle a bien un endroit où elle se pose, le sien, mais où est elle donc ? Le reste du temps ? Et le reste est vaste, moins que le temps, mais vaste quand même.

Le temps : elle le façonne. A sa manière. En amour, en combat, en conviction, en colère, en apprentissage, en recommencements, en coups de foudre, en doutes, en paniques -toujours surmontées, comme si elle était l’inventeuse de l’adrénaline-, en tentatives perpétuelles d’être juste selon son état d’âme et son sentiment haut porté de la fidélité, en assistante sociale underground des cas d’espèces, en ivresses où l’on perd tout, sauf le sens de la navigation solitaire, en orpheline qui apprend à ne pas l’être, oui qui croyait l’être, en verbes hauts et tranchés, en mots directs, uppercuts nécessaires pour défendre sa peau, la peau de celles ou ceux qui lui sont chers. En éclats. Et en errances quelques fois. Juste un peu.

Yuna est ainsi, une sorte de successions de ciels, donc de cieux, en perpétuels révolutions, malmenés, calmes puis agités, clairs et obscurs, avec des pénombres enlacées. C’est là qu’elle devient DJ, rare femme où les petits ou grands mecs sont rois, qu’elle devance sans cesse, parce qu’elle a un duende particulier, cette sorte d’instinct rare, cette amplitude du sensible et du goût, cette capacité unique de l’altérité, sans leurre, sans barouf, juste avec la vérité vraie de quelqu’un qui cherche l’autre, les autres, jusqu’à la moelle, jusqu’à l’os, jusqu’au cœur.

 

 

En 2010, elle rejoint le collectif des Ateliers du Vent à Rennes, qui développe, une aventure artistique hors normes, où se croisent théâtre, musique, écriture, arts plastiques... Des gens merveilleux. Et un lieu ou elle se sent à merveille !!!

 

Yuna, tout ce temps là, est devenue Wonderbraz.

Elle tape le ping-pong musical avec Sal Ricalde, de Tijuana, le Dizzy Sound System, ou mixe avec le vidéaste Thierry Salvert. Avec Erik Marchand, chanteur à l’écoute du monde, elle s’éclate et ça se voit, quand ils balancent de la musique de l’Est, à fond la caisse.

 

Wonderbraz, c’est aussi du sur-mesure thématique, pour un évènement, un festival. En fait, tout est prétexte pour aller à la pêche aux musiques inattendues.

Wonderbraz tire les gens de leur bulle. Wonderbraz tire les gens de leur pull.

Wonderbraz peut balancer aussi bien de la pure techno, du hip hop, du rock, que faire voyager le chaland, le mener en bateau, au Brésil, en Afrique, en Turquie, en Roumanie...

 

Mais à un moment ou un autre de la soirée, y a toujours un type qui se pointe et qui demande, mine de rien, l’œil rivé sur son décolleté : Au fait, Yuna, c’est quoi ce truc, la musique que tu passes, là ?...